Analyse de l'esprit des jeux vidéos de type gestion, stratégie, RPG (Albert)

Le jeu de gestion consiste à gérer un empire virtuel ou une structure plus réduite comme un club de foot par exemple. Le plus souvent il s'agit tout simplement de la gestion économique de cette structure, il faut le préciser car cela pourrait être différent. En effet on peut imaginer un jeu de gestion des ressources humaines, et d'ailleurs je pense que la psychologisation de la vie dans le style magazine féminin chronique boulot vie de famille va favoriser le développement de ces jeux de gestion des ressources humaines, qui offre l'opportunité aux éditeurs de jeux vidéos de toucher un public plus large car plus féminin, l'exemple phare ici c'est les Sims bien sûr.
Mais même dans les Sims, il y a une gestion économique et ça on peut s'en rendre compte par la prise en compte d'une monnaie dans le jeu, que ce soit le dollar, ou la bonne vielle pièce d'or au fond c'est la même chose, le type de monnaie est adapté au contexte du jeu, à ce propos nous reviendrons plus loin sur le pourquoi du succès des univers moyenâgeux, d'où vient la pièce d'or justement.

1ere idée: L'utilisation dans les jeux de gestion d'une monnaie est très répandue, bien qu'il y ait également d'autre facteurs à gérer précisément que le facteur comptable.

On peut considérer le jeu de stratégie exactement du même point de vue que le jeu de gestion, en effet un jeu de stratégie c'est un jeu de gestion avec des phases d'action en plus, les phases de combat. L'analyse ici ne porte pas sur ces phases d'action, que nous mettons donc volontairement de côté mais sur les mécanismes de gestion au sens large.
Gestion de quoi? Gestion des ressources, gestion des armées pour les jeux de stratégie. Allons un peu plus loin dans cette analyse du gameplay typique d'un jeu de stratégie. Il se déploie sur une carte souvent appelée carte du monde car elle clôture l'univers du jeu. Sur cette carte il y a des ressources dont qu'on doit d'abord exploiter pour pouvoir commencer à se développer. Petite parenthèse, mais peut être que le mythe d'une croissance infinie dans un monde fini est réalisable ici, dans le jeu, bon...
Donc on extrait des ressources d'une prolixe nature pixelisée, mais dans un certain laps de temps. Il faut du temps pour que le minerai de fer aille de vos mines à vos ateliers ou il sera transformé en outils et en armes par vos forgerons. Donc on attend.

2ème idée: L'accumulation (des ressources) est le point de départ du jeu de gestion et elle se fait dans un certain temps.

Cette accumulation qui va devenir de manière exponentielle de plus en plus rapide, au fur et à mesure que le joueur réinvesti une partie de son budget virtuel dans l'outil de production, ce qui consiste en pratique à améliorer des bâtiments ou à débloquer des technologies.
On voit donc qu'il s'agit d'une logique capitaliste, voir même impérialiste quand le jeu propose une conquête du monde. Finalement il s'agit d'optimiser au maximum les rendements de certains processus, ce qui en soi peu développer l'esprit pratique, mais nous fait froid dans le dos quand on transpose cette logique même à la réalité économique, en clair on appelle ça des licenciments boursiers. Attention je ne suis pas entrain de dire que les joueurs ne savent pas faire la différence entre la réalité et le jeu vidéo. J'essaye simplement de décrire la logique des jeux de type gestion, stratégie et RPG, et de montrer en quoi elle coïncide avec la logique ou l'esprit économique pour ne pas dire économistique. Je laisse ensuite à chacun le soin tirer les conséquences qu'il veut du parallèle que j'essaye le plus modestement du monde de mettre en lumière. L'écrivain est tout puissant, sans doute suis-je guidé par quelques préjugés qui font que j'ai plaisir à faire cette analyse, ne serait-ce que pour aiguiser régulièrement notre esprit critique comme une lame qui n'a pas forcément vocation à tuer un buraliste de plusieurs coups de couteau au thorax et au dos.

3ème idée: la gestion dans les jeux vidéos nous rappelle étrangement un certain modèle économique classique du capitalisme de papa que je nommerai impérialisme napoléonien séquencé.

Cependant, nuance, une prise en compte du bonheur ou de l'ordre public existe dans les jeux de stratégie les plus récents, il n'est parfois plus possible d'envoyer des milliers d'hommes à la boucherie car votre territoire est trop précarisé, mais là encore c'est un motif gestionnaire et non moral qui pousse à s'occuper du bon peuple, machiavélisme de bon aloi, absurde mise en statistiques du bonheur, ce concept trop vague. Alors oui si il faut en arriver là découvrons nous, allons faire un terrible tir de barrage suivi d'une petite charge de cavalerie sur ce champ de bataille qu'est la morale. Est-ce que c'est moral de tuer des centaines de personnes dans des jeux, de se comporter comme un dictateur? Je ne sais pas, peut être que ça défoule. Mais peut être aussi que ce n'est pas ça le plus important. Car comme je l'écrivais tout à l'heure je pense que le joueur sait faire une distinction morale ou même simplement objective entre le tout et l'écran. D'ailleurs ces questions morales nous gènent, en tant que joueur ce n'est pas là le plaisir recherché. On préfère souvent s'amuser à faire des choses impossibles en vrai et souvent illicites comme tuer principalement que des bonnes actions. En effet quelle gratitude attendre d'un script?

4ème idée: Je remarque qu'en plus du modèle économique typique du jeu de gestion, le jeu de stratégie propose un modèle politique et diplomatique, c'est peut être une de ses particularités. Cependant le temps de jeu consacré aux phases ouvertement politiques et diplomatiques est quand même infime par rapport au cœur du jeu qui est en gros le poste de ministre du budget.

Le RPG répond lui aussi parfaitement au critère de la présence ou nom d'un système monétaire en son sein. Seulement la façon d'obtenir de l'argent et des ressources est différente. La monnaie et les ressources, qui sont dans ce genre de jeu des items, sont obtenues en majorité par des combats victorieux contre des ennemis qui apparaissent aléatoirement sur la carte et dans les donjons. Ce n'est plus seulement la nature qui est donatrice de bienfaits, c'est l'univers du jeu lui même avec ses coffres qui contiennent de l'or et qu'on laisse sans surveillance un peu partout, ces auberges ou il y a toujours quelque chose à voler.

5ème idée: Si jamais le jeu de gestion/stratégie répond à une logique de grand patron de la belle époque alors le Role Playing Game répond plus directement à l'état d'esprit du receleur brocanteur verreux, héroïsme à part.

En disant celà je laisse les phases d'action de côté, et je rappelle ici d'ailleurs la présence de ces phases de combat dans les RPG, plus ou moins actives plus ou moins tactiques, et qui font il me semble tout l'intérêt du genre.
N'importe comment il y a une différence d'échelle entre la gestion d'un empire quel qu'il soit et la gestion d'un personnage et de ses quelques compagnons. Mais dans tous les jeux étudiés ici il s'agit toujours de faire augmenter son potentiel d'action, de combat (son skill) par des moyens économiques; exploitations de ressources naturelles d'une part, gain et revente d'items de l'autre.

6ème idée: l'activité ludique de gestion économique permet dans le jeu le développement d'une activité ludique civile (jeux de construction) mais aussi très souvent belliqueuse, notamment dans la grande majorité des RPG.

C'est d'ailleurs dans les RPG que la différence est la plus flagrante entre les phases d'action, qui sont quand même les plus nombreuse dans ce style, et les phases chez le marchand. Mais finalement qu'est-ce qu'on a fait sinon des allez-et-retours chez le marchand auquel on vend notre butin, mais auquel on achète aussi certains items rares ou utiles de toute façon ces mots sont presque synonymies ici, tout à fait corrélés à la loi de l'offre et de la demande, comme de du.
Cette lubie d'avoir les meilleurs items, de trouver tous les items et finalement c'est l'item nouveau qui nous plaît comme un pantin sur ressort qui sortirai d'une boîte et amuserai un instant notre conscience inquiète de gros bébé rassuré.

7ème idée: Que ce soit dans un jeu de gestion, dans un jeu de stratégie ou dans un RPG finalement qu'est-ce qui nous plaît le plus, les phases d'action ou les phases de gestion? Les deux a coup sûr, ou peut être une troisième plus fugace, la phase de découverte, découverte d'un nouvel item, de ses caractéristiques de son image même, ou encore découverte d'un nouveau bâtiment d'une nouvelle unité d'une nouvelle capacité.

Il s'agit de faire le tour du jeu, tour de découverte pour les joueurs lambda, tour complet pour les plus acharnés, jeu fini à 100%. Entre temps les phases d'actions peuvent devenir répétitive, car justement dans les trois types de jeu étudiés l'action sollicite assez peu les réflexes voir très peu. Alors seules restent les phases de gestion pour nous occuper, ce plaisir qu'on a à cacher quelques noisettes dans le tronc d'un arbre, observateur inquiets du développement virtuel de nos calmes aventures prévisibles, contemplateur béats de nos avoirs dans cet autre monde.

8ème idée: un RPG ou un jeu de gestion, nous mène de découverte et de découverte et nous tient en haleine par son scénario, ses missions, ses donjons. L'action nous y déçoit plus souvent que la gestion fidèle à elle même à sa rigueur comptable alors que vers la fin du jeu l'action peut avoir moins d'attraits, le potentiel d'action ayant été maximisé par les actions économiques au sein du jeu (et par l'expérience également, autre ressort majeur), il rend toute confrontation avec des ennemis tellement plus faibles moins ludique voir ennuyeuse. Finalement ce qui était ludique c'était la voie, le chemin pour y arriver, galérer contre des crapauds pourris, ne pas avoir assez de monnaie pour accéder à mieux.

Et dans cette ascension vers la domination recherchée le comportement économe et travailleur est la condition. Pas étonnant que certaines personnes fassent du jeu vidéo un marché, un commerce, un métier ou plus prosaïquement une passion. Conversion des monnaies entre le bon vieux dollar us et la pièce d'or ou autres gils.

9ème: Toujours essayer de profiter du jeu, de ses bugs, pour le pervertir, le saturer le surclasser le rincer, le finir à la bien. L'esprit opportuniste se retrouve un peu partout dans le monde gringo.

Mais sentant ce texte se découdre car il pourrait déjà être fini, je vais maintenant aborder le dernier point que j'ai déja annoncé plus haut à savoir l'attrait pour un univers moyenâgeux qu'on pourrait qualifier d'héroïque fantaisiste pour faire rugir les puristes. On opposera à ce type d'univers un autre type courant sur la toile, l'univers dit futuriste technologique: Mars, 2160 après Jésus Christ.
Pour moi cet univers paysan un peu punk comme il en existe dans les Vosges ou ailleurs reflète un désir de retour à la nature. Ou encore l'envie d’interagir avec un environnement de plus en plus vaste, de plus en plus précis, de plus en plus libérateur. Au contraire je pense qu'un univers techno-futuriste apporte une touche beaucoup plus positive à la technologie, à l’ordinateur, au support même du jeu. Cependant ces considérations esthétiques sont secondaires pour les vrais gamers qui recherchent avant tout le plaisir du jeu, d'un bon jeu bien complet régulièrement mis à jour.

10ème idée: L'envie d'aller couper du bois dans un jeu vidéo. Faire son jardin dans la nasse. Dans son salon. Dans sa chambre.

Remarque: l'esthétique des jeux de gestion/stratégie répond souvent à un modèle historique ou pseudo-historique, dans ces cas là l'esthétique est totalement logique quand c'est bien fait.

De la problématique du couple. (Anton. S)

Il s’agit là d’une évidence qui n’est pas toujours pointée : la source de toute satisfaction et de toute frustration provient du désir. Il ne faut donc pas s’étonner que les relations humaines les plus compliquées aient parfois lieu au sein des couples. Il n’y a une force de désir considérable déployé que l’on ne retrouve quasiment pas ailleurs. À tel point que la quantité de désir, et donc d’attente envers l'autre, ne pourrait être comblée dans son ensemble. On en vient donc a de possibles et multiples situations conflictuelles.

Eloge de la résignation (Albert)


Dans le grande tradition des auteurs romains voici un éloge de la résignation que j'ai écrit il y a quelques années, on est tout autant dans la rhétorique que dans la philosophie, mais après tout n'est on pas là pour faire éclater ces catégories toujours trop restrictives?

Lorsque nous entreprenons de mener quelque projet à terme selon un plan fixé par nous même, il arrive fréquemment que des évènements inattendus viennent perturber la réalisation de ce plan.Si ces éléments perturbateurs sont assez importants pour qu'il nous semble que notre projet soit en fait beaucoup plus dur à réaliser que nous ne l'imaginions, nous sommes pris par le découragement.Nous préférons alors abandonner notre projet, et renoncer à ses bénéfices plutôt que de subir encore et encore de nouvelles épreuves qui, nous semble-t-il, nous serons plus coûteuses que les bénéfices escomptés.

Il est des personnes qui se découragent si facilement, qu'ils n'entreprennent plus rien, de peur de rencontrer le moindre obstacle, la moindre contrariété. Ceux là sont des tristes sires, dont la vie se réduit à des actions habituelles qui pourraient tout aussi bien être effectuées par un automate.Car, en effet, l'adaptation à des situations changeantes, la résolution de problèmes sur le tas, telle est la caractéristique de l'homme habile et débrouillard, de l'aventurier qui, pour échapper à l'ennui est prêt à se lancer dans les entreprises les plus risquées, les plus difficiles, les plus palpitantes.Le sage, n'est ni l'homme du découragement, ni l'homme de l'aventure. Lorsqu'il entreprend d'accomplir quelque chose, il le fait sans précipitation, et en connaissance de cause. Il a parfaitement conscience que cette entreprise peut échouer et il est tout à fait résigné à cette possibilité.

 L'homme qui s'acharnerait contre vents et marée, à poursuivre un projet irréalisable, qui y perdrait toutes ses forces et même la vie, est un héros digne de la plus grande curiosité et un fou. Le joueur qui perdrai toutes ses économies aux jeux du hasard et continuerai à jouer est un adorateur du destin dénué de toute liberté.

 Ainsi, qui sait arrêter à temps, qui sait sauter du wagon en marche avant que la vitesse ne soit trop élevée pour espérer ainsi s'extraire du train sans tomber trop mal, celui là fait preuve de sagesse. La résignation quotidienne, généralisée à l'égard de tous les phénomènes possibles de la vie est l'aliénation la plus haute à laquelle l'homme puisse parvenir, et elle n'est que la forme négative du fatalisme, alors que l'espoir sans limites du joueur en est la forme positive. Mais la résignation ponctuelle, le fait de renoncer à une solution déterminée parce que les données du problème ont changé, cela est chose fort utile dont seuls les esprits les plus bornés diront qu'elle est une forme de déni de soi.

 Le véritable déni de soi c'est de ne pas reconnaître que l'homme peut s'égarer sur des routes qui ne mènent nulle part. Et à ce moment là, c'est encore un progrès que de faire marche arrière.

La résignation est un suicide quotidien. [Honoré de Balzac]

Je fais des voeux pour eux [mes bienfaiteurs], moi qui ne prie jamais Dieu, et qui me contente de la résignation. [Voltaire, Correspondance]

Gardez-vous bien d'attaquer le caractère d'Iphigénie [dans Racine] ; sa résignation est un enthousiasme de quelques heures. [Diderot, Lettres à Sophie Voland]

La première loi de la résignation nous vient de la nature. [Rousseau, Émile, ou De l'éducation]

L'innocence inspire facilement la résignation. [Genlis, Veillées du château t. I, p. 366, dans POUGENS]

La pure et entière résignation de soi-même, pour obtenir la liberté du coeur. [Corneille, Lexique, éd. Marty-Laveaux]

Aphorisme, conscience et sentiments (Albert)

Comme nous semblons être plusieurs à s'intéresser à la relation entre pensée et émotions je publie un court texte de derrière les fagots pour lancer le débat:

La prise de conscience, une rupture, c'est quand la pensée stope.
Eloge de l'inconscience, de la divagation, de la pensée legère et fluide.
La raison à côté apparaît lourde et mécanique comme une grosse charette.
La pensée claire et distincte c'est le refuge des ignorants.

Ego d’artiste (Anton. S)



« Laisser une trace sur le monde » A chaque fois que j’entends cette phrase je pense à de la merde. Une grosse trace de frein comme on dit. Cela étant dit, tout acte de création se détache difficilement de cette idée - laisser sa trace-.

Le tagueur symbolise bien ce besoin. En le faisant parfois vulgairement d’une simple signature ressemblant à un gribouillis il ramasse les critiques des « admirateurs du véritable art avec un grand A ». Mais quoi ? Ne leur rappelle-t-il donc pas à tous ces « artistes » que leur quête se ramène précisément à ça : un simple gribouillis sur un mur marqué d’identité et qui, quelle que soit la qualité de l’encre, finira par disparaître ?

Le nom de l’ennui (Anton. S)



L’ennui ne provient décidément pas d’un manque de motivation. J’entends les adorateurs du travail siffler « L’ennui n’existe pas pour celui qui aime le travail, l’ennui est le produit de la fainéantise ». Et au siffleur il faut poser une voix froide : L’ennui est une contrainte qui naît des esprits pleins de désir. Ce n’est effectivement pas une absence d’envie, c’est même précisément tout le contraire ! Il s’agit clairement de désir tournant à vide, d’un désir en action sans objet. Il y a donc une énergie orpheline qui dit précisément comme l’enfant « je ne sais pas quoi faire » et à quoi il faut rajouter la suite implicite « mais j’ai très envie de faire ».

Sur le sol glissant de paris (Anton. S)


Sur le sol glissant de Paris, capitale de la glorification du travail, on a vite fait de trébucher sur un sentiment de haine envers son prochain. La nécessité de devoir s’entasser dans des transports en commun proches du débordement, dans une course contre la montre la journée entière, engendre une idée de la cohésion sociale douteuse. Dans un milieu où il n’y a littéralement ni le temps ni l’espace, la lenteur est devenue insupportable et les individus qui ne suivent pas la cadence folle sont considérés comme des encombrants.

Cette idée m’a été confirmée par une discussion tenue avec deux parisiens à propos des suicides sur les voies de métro. En parfait acteur fonctionnel de la société ils ne comprenaient pas que l’on puisse commettre de tels actes.
Un premier parisien me dit donc : « Un jour j’ai assisté à un suicide sur la voie, l’homme a sauté devant mes yeux, un de ses bras est venu s’écraser à mes pieds. J’étais couvert de sang, c’est dire la honte que j'ai ressentie en revenant chez moi ! Les gens me prenaient pour un meurtrier ! »

Un deuxième répondit « Surtout qu’ils pourraient aller se suicider ailleurs, ce n’est pas comme s'il n’y avait qu’une seule façon de se tuer ! Ils retardent les trains et nous empêchent d’aller travailler ! »

En effet, il y a des suicides plus intimistes et moins douloureux qu’un saut sous un wagon de métro. Ce qui laisse la liberté de déceler un certain message dans le geste non dénué de sens. Un individu qui en vient à se sentir inutile dans une société où la productivité est la plus haute des valeurs ne peut se voir que comme un obstacle qu’il faut faire disparaître. Voilà donc la belle idée de notre société moderne qui prend acte sous un métro, symbole de la frénésie des travailleurs parisiens.

L'art ou de l'utilité suprême de l'esprit (Anton)


L’inspiration prend racine dans un manque qui veut être comblé ou d'un fardeau qui doit être déchargé. Elle est un gouffre sans fond qui veut être gorgée de création à défaut de l'être par l'objet réel désiré. Une grande partie de la création artistique possède une dimension sublimatoire en tant qu'elle procède par transposition nécessaire d'une forme à une autre.

 Si l'on peut protester en rappelant qu'une approche de la création vue sous l'angle du pur plaisir est possible, on butera malgré tout sur le problème de la nature du désir. Une approche gratuite de la création amènerait avec elle l'idée que nous pourrions agir sans cause précise, faisant apparaître du même coup des besoins développés ex nihilo. En refusant ce postulat, l'expression artistique devient un besoin à part entière aussi nécessaire que n'importe quelle fonction vitale du corps.

 Au même titre qu'il est indispensable de rejeter certains éléments matériels de notre corps pour sa conservation et d'en absorber pour combler ses manques, l'esprit doit aussi exprimer certaines émotions reçues pour ne pas se consumer lui-même ainsi qu'en créer pour combler les vides où il pourrait sombrer. La création prenant ses racines dans le besoin et non dans une illusoire inspiration "géniale", la pseudo-condition supérieure de l’artiste devient donc complètement obsolète.

Ou comment pervertir l’objet de la science (Anton)



Il y aujourd’hui des pseudo-adeptes de la science qui voudraient tout réduire aux paradigmes reconnus. Tout ce qui dépasse des limites établies par un domaine auquel, pour dire vrai, ils ne comprennent rien est par conséquent impossible pour eux. Ainsi, l’on peut placer devant leurs yeux une chose bel et bien réelle mais inexpliquée qu’ils appelleront immédiatement « hallucination » et invoqueront la folie dans le fait d’y accorder quelques crédits que ce soit.

 Il faut voir dans de tels comportements une peur de l’inconnu prononcé coupant à toutes réelles interrogations, c’est-à-dire tout le contraire du tempérament du véritable chercheur scientifique. Quand le scientifique réel essaye de renverser les lois du monde en assumant les conséquences d’un possible changement de paradigme, l’adepte de la science lui se sert des lois scientifiques pour se donner l’illusion d’un contrôle sur les choses.

Il voudrait croire que les limites de son entendement et de ses croyances englobent l’univers et par là qu’il n’y ait rien qui puisse venir troubler sa tranquillité et ses certitudes. La science ayant tué Dieu le père et ses dogmes rassurants, les individus en manque de repère lui font à présent une allégeance quasi religieuse.

Nids de vipère (Anton)




« La vérité sort de la bouche des enfants » Oui, cela par le fait qu’ils n’accouchent que de vipères qui n’ont pas encore muées dans la morale. Leur parole parfois piquante et gênante n’est pas encore écrasée par la doctrine bien-pensante. Leurs questions et leurs affirmations sont libres et innocentes en s‘inscrivant dans l'expression d‘affects purs. La maxime : « L'enfant est un nid de vipère » serait donc plus exacte et même d’une plus grande valeur.